Un meurtre pour rien Fernando Ayala / 1956

Un journaliste en déclin s’associe avec un immigrant hongrois pour créer une fausse école de journalisme par correspondance.

Quelques spoilers.
 

On se demande bien quel manque d’inspiration a poussé le scénariste à utiliser des chemins aussi retors et compliqués pour simplement permettre ce “meurtre inutile” qui déchaîne, assez tardivement, les tourments intimes du film noir. Peut-être l’engagement militaire, au cœur des névroses du héros, trouve-t-il un écho dans les préoccupations de l’Argentine d’alors ? Ou que son parcours était mieux travaillé dans le roman d’origine ? Aussi savante soit la mise en scène (transitions de décors complexes, séquence de rêve aux disproportions étudiées), le film est en tout cas très lourd à mettre en place son drame et à nous y intéresser, construisant son intrigue à coups de dialogues explicites, de voix-off, et de flashbacks.

Un meurtre pour rien a en fait surtout pour lui sa partie centrale, et deux scènes virtuoses – une au bar (jouant sur la musique) et celle du meurtre (jouant sur la lumière). Le dernier tiers, reposant sur un rebondissement aussi prévisible qu’il fut long et artificiel à mettre en place, n’est pas exactement désagréable, mais ne carbure plus qu’à l’ironie dramatique et au sadisme psychologique exercé sur son personnage (un homme épais, solide et mûr, sage employé de bureau, dormant même encore chez maman, et comme torturé de l’intérieur sous son costume – une figure qu’on retrouve déjà dans les films noirs mexicains). Difficile par ailleurs de s’identifier au récit : le mariage entre la noirceur du genre et la surdramatisation telenovela qui l’accompagnait alors souvent en Amérique latine (dans le jeu, les tirades, les voix-off, les décisions prises) empêche d’y entrer tout à fait.

Mais l’énergie scénaristique disproportionnée que le projet met en place pour de si petits résultats fait paradoxalement toute la singularité et la bizarrerie du film, pour au final lui bénéficier ; l’ensemble étant soigné, et se suivant pas désagréablement, ce film noir inégal finit par emporter le morceau.

Los tallos amargos en VO.

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