Quelques spoilers.
Présenté comme un “film noir” par la rétrospective argentine qu’avait organisée Camelia, ce Vampire noir est en fait un remake assumé de M le maudit, dont il reprend les mêmes fillettes tuées, le même air sifflé, le quasi-même Peter Lorre (un acteur-clone qu’on a habillé pareil), les mêmes clochards aveugles, et les mêmes égouts (quoique ce dernier point semble aussi tenir du Troisième homme, qui était alors l’avatar le plus récent de l’héritage expressionniste).
Tout le défi du film semble être alors “d’optimiser” le film-modèle de Fritz Lang, en le saturant de péripéties supplémentaires, d’imagerie savante aux jeux de lumière étudiés (qui font parfois mouche, comme lors de la vision du meurtre), ou d’explications psychologiques surlignées. Il en ressort un film séduisant en surface, mais bien moins profond et mystérieux que l’original, qui gagnait à sa froideur logique et à sa grande opacité – il suffit de voir ici le discours final dans sa nouvelle configuration, bien plus faible que son modèle allemand.
Le meilleur atout du Vampire noir réside dans ce que le film maîtrise mal, à savoir son moralisme ambigu qui distribue les bons et mauvais points à sa galerie de personnages, tout en en soulignant sans cesse leur hypocrisie (hypocrisie qui est aussi la sienne : voici encore un film sud-américain de l’époque qui s’ouvre sur un carton nous jurant que non, promis, l’histoire que nous allons voir n’a rien à voir avec notre pays, d’ailleurs elle vient d’Europe, c’est bien la preuve qu’il s’agit d’un pur exercice théorique).
De cette incertitude morale, le film tire ses meilleures cartes : le dialogue de la mère protégeant le tueur devant les policiers, ce personnage de femme handicapée (qui souligne combien le moralisme du film se tient tout entier dans la culpabilité)… Un flottement sensible jusque dans l’épilogue en contrepied du film de Lang – et dont le carton final, immédiatement contradictoire avec ce qu’on a entendu, laisse un goût bizarre et indécis en bouche.
El Vampiro negro en VO.