Quelques spoilers.
Légère douche froide que ce Jeux Interdits, après l’enthousiasme que m’avait inspiré Plein Soleil. Ces bons mots de gamins surjoués, cette recherche d’efficacité peu habitée dès la première scène où tout sonne faux, cette course à la mignonnerie et ces appels peu subtils à l’émotion (jusqu’à la tirade finale en forme de caricature) : par bien des aspects, le film ressemble davantage au reproche de qualité française qu’on a pu lui faire à l’époque (dans tout ce qu’il peut avoir d’assez fabriqué, de roublard) qu’au drame déchirant que laissait présager le talent de son réalisateur.
Quelques petites choses anoblissent ce tableau, néanmoins. Peut-être est-ce anachronique, mais aussi fabriqué que soit ce monde campagnard dans lequel le film nous plonge (où l’on dort tous dans la même pièce, où la mort fait partie du quotidien), il est pour moi une curiosité : j’y débarque comme la petite bourgeoise du film, c’est-à-dire peu habitué – tout m’y surprend et me stimule. Et la différence d’âge entre les deux gamins, ce qu’elle implique (la protection dont se sent investi le plus grand, l’égoïsme borné qu’a le droit d’afficher la petite, l’immaturité dans laquelle cela maintient le garçon, l’implicite amour futur qui se joue ici…), permet de rendre leurs échanges intéressants.
Enfin, même si c’est l’affaire de quelques plans, le cimetière improvisé, cette création tout en poésie macabre posée au milieu de la campagne française, est magnifique. Cette vision est d’autant plus belle qu’elle fonctionne comme un retour du refoulé de la guerre : construit à hauteur de ces enfants qui saisissent mal les principes de la religion comme ceux du conflit, on dirait un petit monument archaïque et païen.
Toutes ces choses cumulées sauvent le film de l’inintérêt et de la complaisance, et la pudeur rare mais bienvenue de certains moments (le départ final invisible) fait le reste.